Évènement trail incontournable en Corse, la Restonica se déroule début juillet à Corte (Haute-Corse). L’occasion de se frotter à des sentiers réputés pour leur technicité, et d’habituer l’organisme à courir sous la chaleur. En voyant les temps de course des années précédentes, Florence et moi avons opté pour le format 33 km du Trail du Tavignanu. Cette course qui affiche un temps moyen (pour le milieu du peloton) de plus de 6 heures s’est avérée un bon choix !
La course en détail
6h15 du matin dans le centre de Corte. Il fait déjà chaud, les coureurs sont extrêmement affutés, on sent que le niveau va être relevé. Les speakers de l’évènement nous rejoignent au dernier moment pour donner le départ. À quelques dizaines de mètres, dans la même rue, l’arche d’arrivée accueille encore les coureurs de l’ultra trail. Eux sont partis 31 heures plus tôt. Pas d’attente ni de sas, les coureurs disséminés sont invités à se déplacer du bon côté de l’arche et le top est donné à 6h30. Malgré les 500 dossards annoncés, il n’y a pas de bousculade dans la petite portion qui nous fait sortir de la ville. Moins d’un kilomètre après la ligne, on entame la première – et principale – montée.
Corte – Padule / 6,8 km – 1274D+ – 91D-
Le rythme est soutenu, la pente d’emblée bien raide mais régulière. Le principal est de trouver son allure et d’être en mesure de tenir un petit moment… le premier ravitaillement nous attend 1300m plus haut !
Le paysage assez sec sur la première portion laisse ensuite la place à un maquis plus dense avec des portions techniques. Il y a notamment un passage bien raide où l’on escalade de grosses pierres. Bonne surprise, à aucun moment je ne suis gênée par le vertige. Il n’y a pas de vide et les chemins sont suffisamment rassurants. On finit enfin par ressortir de la forêt pour atteindre une zone dégagée avec des vues panoramiques. Sur la gauche, on peut admirer l’arche du Scandulaghju :
Une petite descente emmène vers le premier ravitaillement de Padule. À trente secondes près, je suis parfaitement dans mon plan de course (2h). La course s’est complètement fluidifiée ici, nous sommes une petite douzaine de coureurs en simultané au ravitaillement, c’est idéal.
Padule – Boniacce / 7,2 km – 275D+ – 328D-
Il reste encore une portion de montée (un peu plus de 200m) qui est vite conclue. Le fait d’apercevoir le sommet est très motivant et la pente facile. Le début de descente est assez casse-patte, avec un chemin bien raide et jalonné de pierres… qui fait grimper le cardio ! Heureusement, il ne dure pas et l’on débouche sur une belle piste forestière (merci les organisateurs) faussement plate mais néanmoins très roulante. Elle permet d’avaler les quelques cinq kilomètres de plateau beaucoup plus vite que prévu ! Il me faut 1h tout pile pour parcourir cette 2e étape et arriver au ravitaillement de Boniacce. C’est mieux que les 1h20 du plan de course, qui anticipait un plateau technique en crête.
Boniacce – Alzu / 5,7 km – 448D+ – 418D-
La descente d’après Boniacce, annoncée « raide et très technique » sur le site de l’organisation s’avère moins compliquée que prévue. Il s’agit en réalité d’un sentier d’alpage assez étroit, avec certes des pierres mais aussi beaucoup d’herbe, un type de relief que j’aime particulièrement. On passe à côté des fermes et les coureurs locaux – présents en nombre – échangent quelques mots avec leurs amis agriculteurs. La descente se poursuit jusqu’à une vallée où on peut se rafraîchir dans un ruisseau. Il y aura 3-4 spots similaires sur le reste du parcours.
La remontée vers Alzu est agréable car entièrement en forêt donc relativement fraîche et de pente facile. Je passe tout ce moment à discuter avec Olivier, un traileur belge qui se remet à la course après quelques années d’interruption. En cours de route, j’apprends qu’il a déjà bouclé l’Ultra Trail de Madeire, l’UTMB, et même la PTL ! À la sortie du bois, nous débouchons sur un beau plateau herbeux avec une bergerie qui accueille l’avant-dernier ravitaillement.
Cette étape est ma préférée, je n’ai presque pas vu passer la petite heure et quart depuis Boniacce et c’est toujours plus rapide que le plan de course (15 minutes de gagnées). Je garde ma routine du jour : banane, abricots secs, grosse recharge en eau et en compotes et un gobelet d’eau gazeuse. Un petit groupe de musiciens et l’ambiance chaleureuse du site donne vraiment envie de s’y attarder. Mais la température grimpe et je sais que le plus dur m’attend, la longue descente vers Corte.
Alzu – Russulinu / 5,7 km – 95D+ – 927D- (56’)
La suite du parcours est essentiellement descendante, avec des passages en forêts assez variés et toujours suffisamment techniques pour qu’une grande vigilance soit nécessaire. C’est ici que j’ai failli emprunter un mauvais chemin. La fatigue commence à se faire sentir. Il faut continuer à avancer sans se mettre en danger, garder un petit rythme de course, sans céder à l’envie de marcher.
Heureusement, la situation relativement ombragée jusqu’à Russulinu permet de ne pas trop subir la chaleur. Encore une fois, le temps est meilleur que mon prévisionnel (56 minutes au lieu 1h10), je vais peut-être arriver à temps pour déjeuner au restaurant ! Le dernier ravitaillement (Russulinu) est une vraie préparation physique et mentale à l’épreuve qui nous attend. Les bénévoles nous rafraîchissent, à grands coups d’éponges imbibées d’eau de source. Ils remplissent toutes nos flasques (et me demandent à plusieurs reprises si j’ai bien assez d’eau), puis nous laissent repartir en nous encourageant.
À ma question « La descente jusqu’à Corte est-elle facile ? », on répond : « Ce n’est pas une descente, c’est une descente corse… alors ça monte, ça descend, vous voyez quoi ».
Russulinu – Corte / 7,6 km – 171D+ – 497D- (1h13)
Effectivement, ces derniers 7 kilomètres vont être la vraie difficulté de ma course. À la fois parce que j’ai laissé beaucoup de plumes avant, mais surtout parce que nous sommes cette fois-ci complètement exposés au soleil, dans un cadre certes majestueux mais essentiellement rocheux. Et la roche, ça chauffe !
Le parcours suit ici la vallée du Tavignanu (qu’on aperçoit tout en bas) jusqu’à Corte. On a beau apercevoir assez tôt les prémices de la ville, elle semble ne jamais se rapprocher tant le corps est affaibli par la chaleur. Tous les coureurs évoluent en mode survie, en tentant de trottiner pour abréger le supplice.
Enfin, une spectatrice qui semble sûre d’elle nous annonce : « Plus que 700 mètres et c’est la route ». Je me raccroche à cette information et dans un dernier effort, rejoins enfin la surface plane salvatrice. Plus qu’un kilomètre avant l’arrivée, deux petites montées et une vraie descente dans la rue principale jusqu’à l’arche finale. Je suis en surchauffe totale mais tellement heureuse d’être allée jusqu’au bout ! Sitôt la ligne franchie et deux verres d’eau avalés, je me rue dans la fontaine repérée la veille*. J’y resterai 15 longues minutes…
Les coureurs arrivent au compte-goutte, on sent que la dernière portion a été la plus difficile, avec de gros écarts par rapport au prévisionnel calculé sur LiveTrail. + 40 minutes pour moi, même tarif pour Florence qui arrivera une petite heure plus tard et ressuscitera dans la même fontaine 🙂 Au final, je ne suis pas très loin de mon temps estimé pour ces 8 derniers kilomètres (1h13 au lieu d’1h10 sur le plan de course), mais au prix d’un énorme effort physique.
*EDIT J+2 : Si c’était à refaire, j’opterai plutôt pour le tuyau d’eau fraîche, également disponible à côté de la fontaine. Cette dernière semble avoir été la source de multiples piqûres/démangeaisons parmi notre groupe de coureurs 😉
Bilan
6h34 de course, un chrono qui me place en 217e position scratch et 6e de ma catégorie (M2). C’est un temps que je fais habituellement sur des distances de trail marathon (42km), cela donne une idée de la difficulté plus relevée du terrain corse. La course s’est gagnée en 3h29 (Anthony Quilici, un OVNI !) et le dernier finisher a franchi la ligne en 11h13, à la 434e place.
Les notes
Parcours : 9/10
La Corse reste un des plus beaux endroits, proche Métropole, pour pratiquer le trail. Le cadre de Corte, avec ses vallées parcourues de rivières, ses paysages variés – montagne, alpages, forêts, chemins de pierres – est absolument unique. Petit plus (ou moins selon la fatigue…), la quasi-totalité du parcours est sur sentier/chemin, il n’y a qu’un petit kilomètre au départ et à l’arrivée qui se court sur route.
Difficulté du parcours : 9/10
Le Tavignanu trail est technique avec de nombreuses portions caillouteuses et des passages en montée qui nécessitent de s’aider de ses mains. Malgré tout, il reste accessible pour un premier trail en Corse grâce à ses portions roulantes (plateau de …) et son niveau de difficulté moyen en comparaison avec d’autres parcours dans la région !
Fluidité : 9/10.
Malgré un départ groupé, le niveau relevé de la grande majorité des coureurs permet de bien avancer, certes en file indienne pendant la première montée, mais sans ralentissement flagrant. À partir du premier ravitaillement de Padule, la course devient parfaitement fluide jusqu’à la fin.
Balisage : 7/10.
Sur toutes les portions dégagées, l’orientation est évidente car on voit les coureurs de très loin. Les portions en forêt, parfois piégeuses, auraient peu bénéficier de quelques rubalises supplémentaires. Je remercie au passage le coureur corse qui a crié pour m’alerter en me voyant prendre un mauvais chemin…
Organisation avant-course : 8/10.
Les avis sont mitigés sur ce point. Personnellement, j’ai trouvé que le retrait des dossards dans un centre commercial était insolite et amusant. Temps d’attente de 20 secondes, bénévoles charmants et efficaces. La ville de Corte ne dispose peut-être pas d’un énorme choix d’espaces assez grands avec possibilité de parking. Une fois son dossard en poche, on se rend 300m plus loin, dans un gymnase, pour obtenir son sac cadeau : t-shirt et produits locaux. Là encore, organisation parfaite, et de loin le meilleur sac coureur de l’été : bière corse, eau gazeuse, jambon de pays, confiture, canistrellis, et gel de massage à l’huile essentielle d’immortelle.
Ravito pendant la course : 9/10.
Juste ce qu’il faut, sans plus, avec une bonne organisation des bénévoles permettant de ne jamais attendre (notamment pour la recharge en eau). En plus des classiques bananes, oranges, tuc, cake marbré… on peut s’alimenter avec des produits locaux (fromage, saucisson…) et des compotes. Un tableau très précis des produits proposés pour chaque ravitaillement est d’ailleurs affiché à l’avance sur le site de l’organisation.
Ravito d’après-course : pas de note
Mon horaire d’arrivée m’ayant tout juste permis de profiter d’un VRAI repas au restaurant, je n’ai pas testé (ni même vu) le ravitaillement d’après course. Un repas chaud était proposé à tous les participants.
Goodies : 9/10
Le sac cadeau coureur, extra. Le t-shirt de la course, pas mal. Et le cadeau finisher pour le TT (Tavignanu Trail), un joli couteau gravé. J’enlève un point car pour les coureurs qui repartent en avion sans bagage en soute… c’est un objet difficile à rapporter chez soi 😉 Je me suis d’ailleurs évidemment fait confisquer le mien (bonjour le chat noir) tandis que mes copains passaient sur un autre tapis sans se faire contrôler.
Infos pratiques
Matériel
Pour ce trail, seule une réserve d’eau de 1 litre et un gobelet sont obligatoires. Les ravitaillements étant nombreux et régulièrement espacés, cette capacité suffit, à condition de bien boire et recharger à chaque étape. Prévoir casquette ou chapeau, lunettes de soleil si la météo est bonne. Des bâtons sont vraiment utiles pour les 2 sections de montée (sauf si vous n’avez vraiment pas l’habitude). Aux pieds, les Hoka Speedgoat 5 font parfaitement le job ; bien penser à les resserrer avant d’aborder la dernière longue descente.
Y aller
En avion, atterrir à Ajaccio ou Bastia. De Bastia, compter environ 1h de route (louer une voiture) jusqu’à Corte.
Dormir
Chambres d’hôtes à 5 minutes en voiture de Corte : Kyrnflor. Calme, belle piscine avec vue panoramique, chambres climatisées et petit-déjeuner servi pour nous dès 5h du matin. À partir de 110€ par nuit pour 2 personnes avec petit-déjeuner. Un big up à Lucile qui nous a déniché cette belle adresse (ainsi que les restaurants !).
Manger
La veille de la course, sans hésiter la terrasse calme du restaurant U Museu, tenu par une famille de passionnés de randonnée et de trail, qui ne jurent que par Hoka One One. Regardez bien, tout le personnel de service est en tenue chic et… baskets aux pieds ! Nourriture excellente, service rapide, une valeur sûre.
Le jour J, pour éviter de remonter trop de marches à Corte, la Rivière des Vins, à 20 mètres de l’arrivée, est une bonne option. La terrasse est rafraîchie par des brumisateurs et les grillades sont parfaites pour l’après-course.
Chiller / se détendre
Si vous arrivez sur place la veille ou restez le lendemain, allez faire un tour dans la vallée de la Restonica voisine (là où évoluent les coureurs de l’Ultra et du Restonica Trail). Une fois garé sur le dernier parking, vous pourrez au choix vous baigner dans les innombrables bassins de la rivière ou randonner en direction du lac de Melo. Le cadre est idyllique. Vous pourrez aussi vous régaler d’une copieuse omelette au fromage corse dans la bergerie de Grotelle ou de Melo (un peu plus haut).
Si vous arrivez/repartez de l’aéroport de Bastia, un passage éclair à la plage est incontournable. Je recommande la paillote Chez Antho, située sur la plage la plus proche de l’aéroport. Déjeuner agréable et Pietra bien méritée, les pieds dans le sable.
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