Prendre le départ de l’UTMB le mieux – ou moins mal – préparée, c’est l’objectif. Comme l’été dernier pour la TDS, je sais que le repérage du parcours est un avantage. Après une OCC et deux CCC, j’ai déjà bien en tête celui de Courmayeur à Vallorcine. En revanche, la première partie de nuit, de Chamonix à la vallée d’Aoste, m’est totalement inconnue. Avec deux jours et une nuit en refuge, l’itinéraire de 70-80 km fait aussi office de bloc d’entraînement. En bonus, le 3e jour, nous complétons par les 20 derniers kilomètres qui évitent désormais la Tête aux Vents.
Les Houches > Les Contamines
Départ des Houches au petit matin le samedi. Nous avons décidé de nous passer du pénible plat qui part de Chamonix et de garder notre énergie pour les portions en montagne. Il ne pourrait pas faire plus beau, j’ai la tête ailleurs et ne vois pas passer la montée du col de Voza. Elle ne devait pas être difficile… La descente démarre par un chemin 4×4 puis enchaîne sur des sentiers peu raides, les quadris restent intacts. Nous croisons plusieurs autres coureurs qui accrocheront le même dossard fin août.
La portion entre Saint Gervais et les Contamines est assez atypique, car on alterne légères montées et parties roulantes, sans avoir jamais l’impression d’être en côte. Là encore, je manque de concentration et ne retiens pas grand-chose, si ce n’est qu’on court plus qu’on ne marche.
Les Contamines > Col de la Balme
Ce n’est pas fini, car une fois passées les Contamines, il faut encore trottiner plusieurs kilomètres à plat pour atteindre la célèbre Notre-Dame de la Gorge. Je me demande ce que nous y réservera l’organisation cette année : musique, néons… ? À partir de là, ai-je entendu maintes fois, tu es tout(e) seul(e) pour le reste de la nuit.
La montée démarre sur un chemin en pente plutôt douce, avec de grandes pierres plates. C’est assez confortable, pas technique du tout. Une portion sur un chemin 4×4 (qui se court) puis un dernier sentier nous mènent au refuge de la Balme, où nous avons prévu de dormir. À l’arrivée, on nous dit que la cuisine est encore ouverte… pour le déjeuner. Je réalise alors qu’il n’est même pas 14h, nous allons avoir du temps à tuer.
Par chance, les douches du refuge « ouvrent » en début d’après-midi, nous faisons donc partie des chanceux à en profiter toutes propres. Le soleil a largement le temps de sécher nos vêtements. Se succéderont ensuite : dîner à 18h30 (très bon), tentative de coucher tôt, tentative de nuit, réveil par l’orage à 3h30 du matin.
La Balme > Les Chapieux
Malgré l’orage qui gronde et l’averse qui vient de passer, nous décidons de maintenir le réveil à 4h30 afin de partir à 5h. Les prévisions sont mauvaises et pourraient se détériorer dans la journée. La lumière du jour arrive très vite, nous éteignons la frontale avant d’atteindre le premier col. Cette fois-ci, ça monte bien. L’altitude se fait certainement sentir aussi, on évolue ici entre 1700 et 2300m.
Le chemin est rocailleux, mais pas technique. On avance assez vite, pressés par les éclairs et la masse de nuage qui semblent nous suivre. Ils sont au-dessus de la Balme au moment où nous franchissons le col.
Franchir le col… c’est vite dit, car en réalité la trace continue vers le haut, il reste presque 200m de D+ à grimper avant d’arriver à la Croix du Bonhomme. Les pierres laissent progressivement la place à l’herbe sur ce versant, et la descente vers les Chapieux est étonnamment facile. Je me souviens des paroles d’Emma l’été dernier pendant la TDS : « Ici, il fait toujours un temps pourri ». Ce n’est pas aujourd’hui que je la contredirai, la pluie s’invitant à nouveau au moment où nous rejoignons la route.
Les Chapieux > Lac Combal
Mais le ciel a beau être gris, j’aime cet endroit sauvage où la végétation vert fluo riche en fleurs multicolores illumine le tableau. Après une portion sur route, on rejoint un petit sentier roulant qui monte progressivement sur le flanc de la montagne. Cette portion permet encore de courir, on se fait d’ailleurs rattraper par d’autres coureurs – plus affûtés – qui ne marchent pas en montée. Enfin, au bout de la vallée, nous devinons le début de la grosse ascension à venir.
Le col de la Seigne. Un des points culminants de l’UTMB (2512m) avec les Pyramides Calcaires (2575m) et le Grand Col Ferret (2536m). La montée est régulière mais longue, et je commence à accuser le coup. Je remonte de longs convois de randonneurs, avec leurs sacs énormes, mais n’ai pas l’impression d’aller beaucoup plus vite qu’eux. Florence et Alexis se tirent la bourre à l’avant, je n’essaie pas de les rattraper.
Enfin le sommet. La brume et le froid nous tombent littéralement dessus, nous convenons d’avancer pour ne pas nous refroidir et vite trouver un endroit pour manger le pique-nique emporté le matin. Mais une pluie battante s’abat, qui se transforme rapidement en grêle épaisse. Ça pique ! Par chance, nous croisons un refuge (fermé) qui nous sert d’abri de fortune.
La grêle ne dure pas, mais il faut repartir, malgré la pluie. Je rate une première fois la bifurcation vers les Pyramides Calcaires, reviens sur mes pas. Nous levons la tête et observons : le front orageux semble s’installer sur ce monticule de pierre. Florence est catégorique : elle ne s’engagera pas sur l’itinéraire avec cette météo, trop risqué. Je ne discute même pas, nous descendons directement vers le lac Combal.
Lac Combal > Courmayeur
Un long plat, qu’il faudra réussir à courir le jour J, mène à l’endroit où sera installé le ravitaillement de course. Plus qu’une bosse avant Courmayeur : l’arête du Mont Favre. J’aime bien cet endroit, il me fait l’effet d’une demi-montée avec son chemin joueur et ses 450m de D+. En dépit de mes doigts gelés, je me sens mieux, termine mon sandwich et avance bien. Même la pluie finit par nous laisser tranquille.
À Checrouit (aka Maison Vieille), le panneau UTMB est déjà prêt… à moins que ce soit celui de l’an dernier ? Le timing est bon, on décide de s’arrêter pour se réchauffer, se sécher et manger. J’en profite pour réserver la navette retour Courmayeur-Chamonix (voir infos pratiques ci-dessous), nos places sont assurées et on peut se délecter tranquillement de pasta al dente et de polenta aux champignons.
Ne reste plus qu’à descendre les 750m de D- jusqu’à Courmayeur. Le chemin, d’abord large et facile, rétrécit ensuite. La pente est relativement raide, même si cela ne me semble pas difficile ce jour-là (on en reparlera le 31 août n’est-ce pas…). Des marches viennent pimenter le tout, Florence les avait beaucoup aimées en 2022 !
Une glace, une limonade (tellement meilleure en Italie qu’en France), un café, et il est temps de monter dans le bus. Trois-quarts d’heure plus tard, il nous dépose devant la gare de Chamonix Sud.
Vallorcine > Chamonix
Dernier jour, ou plutôt demi-journée, juste ce qu’il faut pour boucler la portion de Vallorcine à Chamonix. Depuis quelques étés, celle-ci ne passe plus par le mythique sommet de Tête aux Vents. Nous retrouvons Eric et David, deux amis qui préparent la même course et sont venus exprès d’Alsace pour repérer l’endroit.
Juste après le col des Montets, le chemin s’engage en direction de la réserve naturelle des Aiguilles Rouges, dans le Bois du Plagnolet. Mais attention, il ne suffit pas de franchir le Béchar (1720m) pour être tiré d’affaire. Malgré un profil descendant, les difficultés se concentrent dans ce petit segment (le sentier des Gardes) où toutes les racines de la forêt semblent s’être liguées pour freiner notre progression.
J’avais un très mauvais souvenir de ce passage, déjà emprunté sur la CCC 2019. C’est confirmé, je vais probablement insulter la terre entière lorsque je serai ici avec 150 kilomètres dans les jambes… Même aujourd’hui, en forme et concentrée, je me débrouille pour me tordre une cheville, David un genou.
Enfin, très (trop) longtemps après, la trace remonte et finit par rejoindre la piste de ski. Au moins, ici, on sait – puisqu’on voit – ce qu’il nous reste. La Flégère, la délivrance, (presque pour tous les coureurs) est dans la brume. Mais la descente vers Chamonix n’est quasiment plus qu’une formalité.
Il faut juste rester concentré sur la première portion en single, ensuite ça déroule sur une piste large à partir du chalet de la Floria. Nous rejoignons les rues de la ville juste avant 13h. L’horaire parfait pour déguster un gigantesque hot-dog au Cool Cats, avant de prendre la route.
Pratique
Navette Courmayeur-Chamonix :
Départ de Courmayeur pmb ou Funivia Skyway, arrivée Chamonix Sud
15€/personne, aosta.arriva.it
4 navettes par jour en été (10h15, 11h45, 15h45 et 18h), environ 45 min de trajet.
Possibilité de réserver sa place en dernière minute sur internet, en fonction de son horaire d’arrivée estimé.
Dormir en bas :
- Rocky Pop Hôtel aux Houches, grandes chambres, à partir de 77€ la nuit pour 2 pers. (plutôt 150€ en haute saison), petit-déjeuner gargantuesque (14€/pers).
- Hôtel la Couronne à Argentière : un 3* refait récemment, avec un bon restaurant. Chambres à partir de 120€ au mois d’août.
Dormir sur le parcours :
- Refuge de la Balme, 62€ la nuit en demi-pension. Pique-nique sur demande 13€.
- Autres options : Refuge des Prés, Refuge de la Croix du Bonhomme, Les chambres du soleil ou le refuge de la Nova aux Chapieux, refuge des Mottets avant la montée du col de la Seigne…
Manger :
- Rifugio Maison Vieille (début de la descente vers Courmayeur), excellents plats de pâtes, polenta, et cafés évidemment
- Cool Cats à Chamonix, sport incontournable pour déguster hot-dogs généreux et salades. Pour le café, mieux vaut passer son chemin.
Matériel :
Prévoir sac à viande pour la nuit en refuge (à la Balme, vous pouvez en acheter sur place pour 3€), petite serviette et nécessaire de toilette. Bâtons utiles, mais pas indispensables pour ceux qui ont l’habitude de s’en passer. On trouve de l’eau à Saint-Gervais, aux Contamines, aux Chapieux… et sur le parcours surtout si on dispose d’un filtre.